Accusé de mener une guerre dissimulée sous le prétexte du pillage des ressources minières, le Rwanda ne semblerait pourtant pas limiter son ambition à l’exploitation des pierres précieuses. Nombreux sont des analystes et chercheurs du monde qui pensent que la guerre aurait également des ambitions expansionnistes. A en croire ceux qui soutiennent cette thèse, à travers la qui se mène dans la partie Est de la RDC, le Rwanda serait également à la recherche des nouvelles terres pour, non seulement y mener une guerre économique, mais aussi y installer ses peuples.
Selon un observateur politique ayant requis l’anonymat, réduire cette guerre à une simple quête de minerais est une analyse trop simpliste.
Dans une déclaration accordée à Tazamardc.net ce mercredi 5 mars 2025, sous anonymat, il affirme que la véritable motivation du régime de Kigali réside dans la quête d’espace vital pour sa population, majoritairement rurale et confrontée à une crise foncière aiguë.
« Le Rwanda n’a plus d’espace pour loger sa population paysanne ni de terres arables suffisantes pour garantir sa sécurité alimentaire. Kagame veut de l’espace en RDC, il convoite nos terres et est prêt à tout pour les obtenir, y compris à déclencher une guerre totale. C’est une question de survie pour lui et pour son peuple », a-t-il déclaré.
D’après lui, le Rwanda a intensifié son offensive afin d’affaiblir la RDC et de l’amener à accepter une solution défavorable. Il estime que le dialogue prôné par la communauté internationale est un piège destiné à faciliter la mise en œuvre du plan expansionniste de Kigali.
« Si nous croyons que le problème du M23 se réglera par le dialogue, il faut alors être prêt à voir une partie de notre territoire annexée par le Rwanda. Ce sera ça ou la guerre », poursuit-il.
Une guerre pour défendre les Tutsis et leurs terres ?
Le discours officiel du Rwanda sur la guerre en RDC est désormais démystifié. Alors que Kigali prétend vouloir éliminer la menace des FDLR à travers ses incursions en territoire congolais, la réalité de son agenda semble toute autre.
Dans une sortie médiatique virale, Bertrand Bisimwa, bras droit de Corneille Nanga, coordonnateur de l’Alliance Fleuve Congo, dont le M23 est membre, a exprimé sans détour la position du M23/AFC, affirmant que ce mouvement armé se bat pour la défense du peuple Tutsi et de ses terres marginalisées par Kinshasa.
« On présente les Tutsis comme le mal de ce pays, comme des étrangers. Pourtant, certaines de leurs familles vivent dans des camps de réfugiés depuis plus de 30 ans, et le gouvernement congolais refuse de les rapatrier sous prétexte qu’ils ne sont pas Congolais. Si nous n’avions pas pris les armes, ils seraient devenus des apatrides. Le Congo nous a trouvés sur nos terres ! À la Conférence de Berlin en 1885, nous étions déjà là. Si le Congo est une nation de « Baswahili », qu’il parte et nous laisse nos terres. S’il ne veut pas des Tutsis, qu’il parte et nous laisse nos terres », a martelé Bertrand Bisimwa.
La guerre de l’identité et des terres
Le docteur Oscar Barinda, porte-parole civil adjoint du M23/AFC, a récemment précisé les raisons qui ont conduit à la création du M23 en 2012. Selon lui, tout découle du non-respect des accords signés entre Kinshasa et le CNDP le 23 mars. Ces accords prévoyaient un vivre-ensemble pacifique et interdisaient toute discrimination ethnique.
Il rappelle que le M23/AFC se donne pour mission le rapatriement des réfugiés Tutsis congolais et la mise en place d’une politique foncière équitable pour leur garantir un accès aux terres agricoles.
« Nous allons instaurer une politique de l’habitat efficace pour que chaque Congolais trouve sa place dans la société et contribue à la nation. Nous créerons des emplois et distribuerons des terres à tous, y compris aux réfugiés Tutsis », a-t-il promis.
De son côté, Jo Sekimonyo, auteur, économiste et militant des droits humains d’origine Hutu, estime que le conflit RDC-Rwanda n’est pas une guerre identitaire, mais un combat pour la domination économique de la région.
« Le problème foncier en RDC n’est pas exclusivement Tutsi ou Hutu. Il est bien plus complexe. Ce n’est pas une question culturelle, mais plutôt un enjeu de pouvoir économique », explique-t-il.
Vers une mobilisation générale ?
Un autre analyste estime que réduire cette guerre au simple pillage des ressources naturelles est une erreur stratégique. Il rappelle que, malgré les propositions du président Tshisekedi pour permettre au Rwanda d’accéder légalement aux richesses de la RDC, Kigali n’a pas cessé ses agressions.
« Pourquoi Kagame accepte-t-il de sacrifier des milliers de jeunes Rwandais sur le front, d’y investir autant de moyens, et de risquer son image à l’international ? Parce qu’il ne cherche pas seulement des minerais. Il veut des terres ! Il veut nos terres ! », a-t-il lancé.
Face à cette guerre que plusieurs qualifient d’occupation, il appelle à une mobilisation nationale pour faire échec au « projet expansionniste » du Rwanda.
« Il est temps de décréter la mobilisation générale. Nous sommes 105 millions d’habitants, dont la moitié a moins de 30 ans. Nous pouvons facilement recruter entre 500 000 et 1 million de jeunes Congolais, âgés de 18 à 40 ans, pour des contrats de 6 à 9 mois renouvelables dans l’armée. Il suffit d’une formation, d’un bon équipement et d’un salaire de 1 000 à 2 000 dollars américains par mois. En cas de décès au combat, une indemnité de 50 000 dollars serait versée à la famille. Cette mobilisation pourrait être mise en œuvre en 9 à 12 mois si nous agissons dès maintenant », insiste-t-il.
Une perspective qui traduit l’urgence de la situation et l’ampleur de la menace qui pèse sur la RDC.
Azarias Mokonzi
Author(s): tazamardc.net
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